syndicalisme [sɛ̃dikalism]

nom masculin

  1. Mouvement ayant pour objet de grouper les personnes exerçant une même profession, en vue de la défense de leurs intérêts.
  2. Activité exercée dans un syndicat.

Le syndicalisme ouvrier a une histoire récente mais fortement diversifiée. Les premières « chambres syndicales » se sont constituées en Grande-Bretagne, en France et aux États-Unis sur des bases locales et dans des corps de métiers précis.

Les traditions syndicalistes.

Les syndicats se regroupent en confédérations dans tous les pays : ainsi, le Trades Union Congress (Grande-Bretagne) en 1868, la Confédération générale du travail (France) en 1895, l'Allgemeiner Deutscher Gewerkschaftsbund issu de la General-kommission der Gewerkschaften Deutschlands (créée en 1890) [Allemagne] en 1919, l'American Federation of Labor (AFL) [États-Unis] en 1886, les Landsorganisationen (LO) en 1898 pour la Suède et le Danemark, en 1899 pour la Norvège.

Trois grandes traditions se constituent dès le XIXe s. dans toutes ces organisations.

La tradition corporatiste, dans le droit-fil des compagnonnages, des mutuelles et des fraternelles du XVIIIe s., favorise la constitution, par métier, de fédérations régionales et nationales. Comme les premières chambres syndicales, elle mobilise surtout des ouvriers qualifiés qui se défendent contre les risques de prolétarisation que l'introduction du machinisme et de l'industrie libérale leur fait courir. Aux États-Unis, l'AFL a été principalement organisée sur le mode corporatiste, avec des syndicats de métier, jusqu'à sa fusion en 1955 avec le Congress of Industrial Organizations (CIO).

La tradition réformiste ne met pas en cause l'organisation capitaliste de la société et cherche à négocier dans les meilleures conditions avec les responsables économiques des entreprises et de l'État. Dans cette tradition se situent la politique des conventions collectives et les grandes négociations nationales pour améliorer la protection sociale et le Code du travail. Les syndicats anglo-saxons sont souvent particulièrement rompus à cette forme de syndicalisme.

La tradition révolutionnaire, très vivante en France et en Allemagne à la fin du XIXe s., se manifeste dans des regroupements de travailleurs destinés à favoriser la solidarité de classe et à créer les conditions du renversement du système capitaliste. La grève générale est, à l'époque, le but que se donnent les syndicalistes révolutionnaires pour obtenir la chute de la bourgeoisie. Ils professent, pour la plupart, un antimilitarisme virulent : « Les travailleurs n'ont pas de patrie. » Cette période a pris fin avec la Première Guerre mondiale.

La liaison syndicat-partis.

Le problème de la liaison entre le syndicat et les partis politiques ouvriers a donné lieu à quatre grands types de formule dans l'histoire du syndicalisme.

L'anarcho-syndicalisme considère que le syndicat doit être absolument indépendant de tout parti politique. La France, l'Italie et l'Espagne ont été très fortement marquées par l'anarcho-syndicalisme, dont la CGT était, à son congrès d'Amiens en 1906, imprégnée. Le trade-unionisme, pour fournir une ouverture politique à la revendication syndicale, envoie des syndicalistes au Parlement au sein d'un parti politique du travail, émanation directe de l'organisation syndicale. C'est dans cette optique qu'a été créé, en 1906, le Labour Party britannique, émanation de l'Independant Labour Party fondé en 1893. La social-démocratie donne l'initiative et la prééminence au parti socialiste pour représenter politiquement les aspirations ouvrières. La conférence syndicale allemande de 1875 affirmait le devoir des travailleurs de tenir la politique éloignée des syndicats ; l'obligation morale pour les ouvriers de s'affilier au parti social-démocrate, qui seul peut représenter la condition ouvrière. Le léninisme accorde au parti communiste un rôle dirigeant dans la lutte de classes. Le syndicat est incapable d'élaborer une politique sans l'aide du parti. C'est dans ce sens qu'on a pu parler, à propos du syndicat, de « courroie de transmission » entre le parti et le monde ouvrier.

D'autres syndicats sont organisés sur des bases religieuses. Ainsi, tous les syndicats catholiques d'Europe, depuis le début du siècle, se sont constitués avec comme but de mettre en application la doctrine sociale de l'Église.

Le syndicat dans les pays totalitaires.

Le corporatisme et son projet de réconciliation entre classes sous l'égide de l'État a été appliqué par le régime fasciste en Italie jusqu'au milieu des années 1930. Dans l'Allemagne nazie, où les anciens syndicats ont été également interdits, cette idéologie a imprégné certaines organisations prétendument syndicales inféodées au parti nazi. Dans les pays anciennement « socialistes », après les discussions sur l'indépendance syndicale par rapport au pouvoir (dont Lénine était partisan), la soumission complète des syndicats à l'État depuis les années 1925, ainsi que l'inexistence constitutionnelle du droit de grève ou son interdiction, a entraîné leur inefficacité totale puis, après les années 1980, leur effacement complet. Aujourd'hui, la construction de centrales syndicales indépendantes est à l'ordre du jour au même titre que la reconstruction de l'économie elle-même.