nom féminin
(gr. epopoiia)
Aux origines de toute littérature, les épopées transmettent un corps de récits traditionnels relatifs à l'ordre du monde et de la communauté, ordre dont l'existence et la stabilité sont le fruit d'exploits des dieux ou de héros exceptionnels. Telles sont l'épopée sumérienne Gilgamesh (XVIIIe s. av. J.-C.), l'Iliade et l'Odyssée (VIIIe s. av. J.-C.), les épopées sanskrites Ramayana, Mahabharata. Cette présence d'éléments surnaturels, du merveilleux – qui donne à des divinités primitives le statut de héros littéraires ou, inversement, à des figures historiques des dimensions légendaires (Charlemagne dans les chansons de geste françaises) – n'est pas un ornement artificiel ; ce grossissement est une nécessité d'un récit qui ne se veut pas une reconstitution historique, mais a valeur de modèle de comportement. Présente dans toutes les cultures, l'épopée semble apparaître dans les moments où le sentiment de quitter un « âge d'or » débouche sur une volonté de récupérer la totalité du passé perdu (Sagas scandinaves, la Divine Comédie de Dante). Les époques de « renaissance », de conquête ont encore ce besoin épique (le Roland furieux de l'Arioste, la Jérusalem délivrée du Tasse, le Paradis perdu de Milton). Le romantisme, par son goût des traditions populaires et la primauté qu'il accorde à l'imagination, a pu recréer un climat favorable à l'épopée (la Légende des siècles de Hugo). L'inspiration épique subsiste au xxe s. dans une forme critique et parodique (Ulysse de Joyce).